Samedi matin. Je me réveille à 7h.
L’Homme et moi avons booké un appart’ juste à côté du départ du triathlon, pour une fois, on ne se lève pas si tôt. Nous sommes à Lacanau.
Pourquoi Lacanau ? Parce que le triathlon nous a été recommandé par une copine, que le half ne faisait QUE 80 km et non 90 (hyper important psychologiquement ces 10 kilomètres en moins), qu’accessoirement la partie vélo était bien plate, que la natation se faisait en lac (important pour l’un des deux copains avec lesquels je suis partie) et que, non-labellisé Iron Man, ce triathlon était bien moins cher qu’un Half Iron Man.
Arrivés avec mes copains le vendredi par le train (tout un poème de trimballer un vélo dans le train), nous avons pu monter nos vélos, les tester sur quelques kilomètres, prendre un apéro, aller voir la mer, reprendre un apéro, retourner diner vers la mer et finalement revenir préparer nos sacs dans nos pénates.
Le matin, je suis finalement moins stressée que prévu. Retrait des dossards ultra facile, on retrouve nos deux copains et on essaie d’entrer dans le parc à vélos.
Premier drame: pas de sac autorisé dans l’aire de transition. Rien. Pas un sac poubelle (utile pour mettre sa combi dedans après la nat’), pas un sachet plastique. Rien. Une spécialité locale apparemment. Et j’ai au bas mot 2000 accessoires en tous genres avec moi (de la vaseline à la paire de lunettes de natation de rechange, que de l’indispensable…). On décide de faire des baluchons avec nos serviettes (ça tombe bien, j’en ai pris 3) et on rentre tant bien que mal installer nos vélos.
Deuxième drame: on regarde les vélo autour de nous. Que des modèles de triathlon, prolongateurs, roues pleines ou semi-pleines. Vélos à plusieurs milliers d’euros. Une fille pose le sien à côté du mien. C’est un Liv aussi mais comment dire ? J’ai tout à coup l’impression d’avoir un tricycle plutôt qu’un vélo. D’ailleurs, après vérification, il fait bien 3 fois le prix du mien… gloups. A vrai dire, rien que son casque fait peur.
Personne ne sourit vraiment (quoique, les garçons un peu plus que les filles), on sent que certains jouent vraiment la gagne. C’est encourageant.
Heureusement que je suis avec mes copains et mon Homme pas loin, on se soutient.
La natation: A l’heure dite, on s’approche de l’eau du lac. 18 degrés annoncés. On a l’habitude, ça ira. On a finalement plus froid hors de l’eau de toutes façons.
Les filles sont censées être séparées des garçons mais au dernier moment c’est le grand bordel et tout le monde plonge ensemble.
Dès le début, je sens qu’un truc ne va pas. J’ai un peu de mal à crawler, mais ça, c’est habituel sur les tri, le temps que le cerveau comprenne ce qu’il est en train de faire et que le corps accepte la fraicheur de l’eau. Mais là, j’ai plus de mal que d’habitude. Je vais faire quelques mouvements de brasse et très vite, je me retrouve seule. J’ai perdu tout le monde. D’ailleurs, je ne vois pas les bouées vers lesquelles je suis censée me diriger. Heureusement, les garçons de l’orga sur leur paddle vont m’encourager et me remettre dans la bonne voie. Mais trop tard, j’ai perdu les autres, je vais faire une mauvaise nat’. En arrivant devant l’arche, je suis persuadée d’être la dernière. Je vais me faire éliminer c’est sûr.
Et pourtant, les spectateurs restés devant l’arche m’encouragent avec ferveur. La ferveur des derniers. Ca me booste, je cours sans problèmes jusqu’à mon vélo, je me change complètement. Je prends une compote, chausse mes chaussures de vélo et zou, c’est parti pour 80km (que je crois).
Le vélo: je ne sais pas du tout combien de temps j’ai mis mais je sais une chose: j’ai 4 heures pour faire la natation et le vélo, c’est peu.
Selon mes prévisions les plus optimistes, ça ne tient pas. Je suis trop lente. Je le sais depuis longtemps.
Du coup, je m’élance en me disant que je vais faire 20 kilomètres et qu’on verra bien ce qu’il en est. Le parcours est super beau, le soleil s’est levé, c’est vraiment agréable de rouler. Bien sûr, je suis SEULE (haha pas de soucis de me faire prendre en train de drafter au moins) mais je savoure. Je suis assez à l’aise sur mon vélo, et je me rends bientôt compte en regardant ma montre que je n’ai pas fait une nat’ si horrible (49 minutes en fait pour 1,9km, c’est lent, je ne me suis pas améliorée depuis l’an dernier mais ça aurait pu être encore pire… et je ne suis pas du tout dernière en fait).
Au bout de 20km, je tente le mangeage d’une pâte de fruits scotchée sur mon cadre. Nickel, ça passe tout seul.
Le truc se complique vers le kilomètre 30.
Météo France (que je consultais frénétiquement toutes les 5 minutes depuis une semaine) annonçait un vent avec des rafales jusqu’à 60km/heure. Pour le moment, la map était plutôt bien protégée mais comme on a fait un rectangle, fatalement, on arrivait dans le vent. Et là, ma moyenne de 26km/heure que je tenais fièrement depuis le début a chuté drastiquement. Je n’osais plus trop regarder… Nous avions deux boucles à faire donc je savais que j’allais revivre ce cauchemar avec le vent qui te pousse littéralement sur le côté. Je n’avais qu’une hâte: revenir au point de départ pour recommencer la boucle et sa partie abritée.
Au bout de 42km, ça y est, je vois l’Homme (qui n’y croyait plus) et personne ne me dit de dégager donc je continue. Je n’ai pas mal aux jambes, aucune douleur, l’énergie tient, j’arrive à me ravitailler et j’essaie de faire remonter ma moyenne.
A ce stade, je suis déjà Quarter Iron Woman et je me dis que c’est pas si mal. Je sais aussi que faire 4 heures ne va pas être jouable avec le vent. Je fais des calculs de dingue, je suis une pro des moyennes horaires de tête (si seulement j’avais fait du triathlon en 4ème, mon prof de maths aurait été heureux), mais rien n’y fait. Il faut que je maintienne un 26-27 de moyenne pour que ça passe.
Le parcours, comme tout parcours de triathlon qui se respecte ne fait bien sûr pas 80 kilomètres mais 82. Je maudis les deux derniers. Je maudis le vent qui m’a fait rechuter ma moyenne horaire. Je maudis cette p¨%*$ de barrière horaire. Je suis à plus de 4 heures. A ce stade, je ne sais pas si les arbitres me laisseront partir pour la course ou non. Je ne sais pas si je dois tout donner ou en garder sous le pied au cas où je doive courir 21kilomètres. J’ai envie de faire pipi comme jamais. Coup au moral.
Quand j’arrive sur la ligne d’arrivée, mon Homme me dit “ça se négocie peut être encore” au même moment où un arbitre me demande de poser mon vélo mais de ne pas repartir. Je fais comme si je ne l’avais pas entendu. Je rentre, je me change, et je m’apprête à repartir. Mais le parcours n’est pas fléché. Je dois demander mon chemin et là, un autre arbitre me déleste de ma puce en me disant que je peux quand même faire la course à pied, je ne serai en revanche pas classée.
GROS coup au moral. J’hésite 2 secondes. Dois-je abandonner puisque je suis disqualifiée ? Et puis non bordel, je ne suis pas venue jusque là pour rien. Mes copains nous ont fait une vidéo d’encouragement, tout le monde est derrière nous, je peux pas les laisser tomber.
Je repars donc, m’arrête au bout de 10 mètres pour une pause pipi très vaguement cachée par un arbre et je continue. Il y a trois boucles de 7 kilomètres. Je décide de les prendre une par une. Mon TFL me dira si ça passe ou ça casse. Très vite, je me sens bien. Aucune sensation de jambes lourdes, juste un peu dégoûtée de ne plus être classée. Surtout que je rattrape un paquet de monde en course à pied. Je ne regarde pas du tout ma montre contrairement au vélo, je fais tout aux sensations. Au point où j’en suis hein.
Je suis déjà fière de moi d’avoir fait la natation + les 82km de vélo. Du coup, je me venge de mon déclassement en encourageant tout le monde. La plupart des gens en sont à leur 3ème boucle, ils souffrent, je les aide autant que je peux. Mais à ma grande surprise, certains en sont à leur premier tour comme moi, je les dépasse donc.
Je vais faire les deux premiers tours sur ce mode, kilomètre après kilomètre. Il commence à faire bien chaud, j’ai gardé mon jersey de vélo dans la confusion mais qu’importe. Je croise mes deux copains, qui ont l’air en forme. Eux ont bientôt fini bien sûr. Pas de soucis de genou, ma genouillère fait vraiment des miracles.
A 14 kilomètres, je rentre dans le dur. Enfin.
Mon pied droit commence à me faire bien mal (j’ai une tendinite sur le côté qui s’est réveillée), et j’ai hâte que ça se finisse. Le parcours est chouette: un peu de bord de mer donc du sable, beaucoup de forêt. Pour la première fois de ma vie, je m’arrête aux ravitos le temps de boire un Coca que je savoure comme jamais. En dehors de ça, je n’ai jamais marché.
Je sais que dans 7, 6, 5, 4…kilomètres j’aurais fini mon premier triathlon long et cette pensée m’amènera au bout.
Sur la ligne finale, je retrouve mes copains qui hurlent et je trouve la force de finir en sprintant (un peu).
6h26. C’est écrit sur la photo. La barrière horaire finale était de 6h30. Techniquement, je suis dans les temps. Quel dommage pour ma puce. Mais la joie l’emporte sur la déception.
J’ai fini un triathlon 70.3, 105km en tout, et en moins de 6h30.
Avec une natation à 49 minutes, environ 3h 15 de vélo et 2h12 sur le semi (avec ma Suunto, dur de voir bien les temps de transition mais c’est grosso modo ça)
Un super week-end avec deux jours entiers de récup et, cerise sur le gâteau, le premier triathlon M de mon Homme le lendemain en moins de 3h. Quel bonheur de l’encourager avec mes potes mais sans participer et en sachant que j’avais déjà vécu l’aventure.
Quand j’étais sur mon vélo, j’avais tout le temps pour réfléchir et je me suis dit que non, on ne m’y reprendrait plus à suivre mes copains (petite trentaine, célibs sans enfants, tu vois le genre) sur des courses de plus en plus dures.
Je suis super heureuse et fière d’avoir fini celle-là, je ferai la Sainté Lyon aussi mais en ce qui concerne le tri, je vais me concentrer sur des M sur lesquels je suis moins à la ramasse et bosser le L jusqu’à être bien à l’aise avant de penser à plus grand -ou pas d’ailleurs.
Pour le moment, le prochain défi est d’être dans la barrière horaire d’une “petite” course de 5km de natation. Easy quoi.
Et encore merci à tous ceux qui ont laissé des encouragements sur Insta, Facebook and co, c’est vraiment super chouette de votre part et ça m’a bien boostée.
Je suis triathlète 70.3 maintenant, et j’ai vraiment kiffé mon week-end.
edit: je me rends compte que je n’ai pas mentionné les copains qui ont super performé, eux…pour leur premier half aussi. Bravo!
Gabrielle
9 mai 2017 at 8 h 24 minUn énorme bravo Elise, finisher avec un tendon en vrac et à peine 3 ans après ton 1er triathlon, tu me bluffes et tu peux être vraiment fière de toi, classée ou non ! A te lire je me tâte vraiment pour me lancer sur le half de saint jean de luz en septembre au lieu du M… mais c’est 90 km de vélo, et pas tout plat ! Bonne récupération, j’espère que tu ne connaitras pas le blues post triathlon (j’ai beau le savoir, ça me fait le coup à chaque fois après l’euphorie de la course, 2 jours après je regarde mes temps et je trouve que c’est nul, que je ne progresse pas assez vite etc.). Mais là, tu es une half iron woman, et ce n’est donné à tout le monde ! Encore bravo !
NB: en principe, aucun sac n’est autorisé au sein du parc vélo dans la plupart des épreuves de triathlon pour des questions de sécurité (sauf éventuellement sac poubelle), il vaut mieux le savoir !
Claire
9 mai 2017 at 13 h 16 minBravoooooo Élise… tu es trop forte… quel dommage pour la barrière horaire… venez chez nous faire des L… 3 francs six sous l’inscription… certes des D+ mais une belle ambiance…
elise
9 mai 2017 at 14 h 02 minet tu es dans quelle région au fait ?
Claire
11 mai 2017 at 22 h 18 minLe sud… Marseille…
Delphine
9 mai 2017 at 14 h 54 minBravo pour ta course! Tu as du mérite et beaucoup de volonté pour avoir couru un semi-marathon alors que tu savais que tu ne serais pas classée. Chapeau!
En voyant les photos, j’ai remarqué que tu cours avec tes chaussures de vélo aux pieds à la sortie de la transition. Pas trop compliqué? Tu n’as pas abîmé les cales?
Je vais participer à mon premier triathlon (short distance) en juin et ce qui m’inquiète le plus, c’est l’enfilage des chaussures de vélo… Je sais que les pros les fixent à l’avance sur les cales et les enfilent sur le vélo mais je ne me sens pas capable de faire ça 😉
elise
9 mai 2017 at 14 h 57 minen fait y avait 20 mètres depuis mon vélo jusqu’à la route et honnêtement j’ai pas du tout pensé que je courais en chaussures de vélo à ce moment là, j’étais complètement dans l’épreuve, si tu ne me l’avais pas dit je n’aurais même pas remarqué… donc enfile tes chaussures normalement, ça ne devrait pas trop te poser de problèmes.
Sophie
10 mai 2017 at 15 h 20 minBravo, je suis impressionnée par ta performance !
Et bravo à Kotaro également 😉
Princesse Strudel
11 mai 2017 at 11 h 58 minFélicitations Elise, tu as assuré comme une chef!
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